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Des temps nouveaux d’évangélisation
Abbé Jean-Marie NDZOMO MALLA | dim. 6 avr. 2025 à 15:23 | dim. 6 avr. 2025 à 15:48
Des temps nouveaux d’évangélisation (En 2 : 3)
- La parole de Dieu est éternelle. Mais elle arrive aux hommes de plusieurs manières, selon les époques et selon les groupes qui la reçoivent (Hé 1, 1). En étant adaptée aux époques et aux groupes, la parole de Dieu, qui est immuable, se laisse traduire et exprimer de façon qu’elle soit accessible aux hommes d’une époque donnée et appartenant à un groupe donné.
- Lorsque les Evangélistes parlent de Jésus-Evangélisateur, c’est de façon laudative (En 11) :
« Voilà un enseignement nouveau, donné avec autorité » (Mc 1 :27)
« Et tous lui rendaient témoignage et étaient en admiration devant les paroles pleines de grâce qui sortaient de sa bouche » (Lc 4 : 22)
« Jamais homme n’a parlé comme cet homme » (Jean 7 : 46)
- Pourquoi le message de Jésus est-il si bien apprécié ?
C’est parce que, bien qu’accessible aux hommes en épousant la forme de leur langage, il ne va pas jusqu’à s’altérer, mais aussi au contraire, il garde toute sa force, toute sa saveur, toute la vérité qu’il veut transmettre.
Ce message n’est pas seulement accessible à l’homme, il est aussi fidèle à l’homme pour que l’homme soit fidèle à Dieu. Cela signifie que le message de Jésus-l’évangélisateur est réaliste et il pousse le destinataire ou le simple auditeur occasionnel à la conversion. C’est un message qui vise à toucher le fond du cœur ou la conscience (En 18). En cela, ce message est forcément révolutionnaire.
- Ainsi donc, pour faire passer notre message aujourd’hui, nous avons à réviser nos méthodes (EN 3). Nous avons également à choisir et à élaborer notre discours dans langage simple, cohérent, donnant l’essentiel de la parole de vie éternelle et l’expliquant le plus loin possible.
- La parole de Dieu étant essentiellement une parole qui fait vivre, une parole de vie, elle est destinée à se transformer en acte (EN 41-42). Nos méthodes d’annonce évangélique doivent inclure l’initiation à l’action transformatrice et qualitative de sorte qu’il n’existe plus ce fameux divorce entre la foi et la vie (Gn 43 : 1).
- Notre manière de porter l’Evangile aux hommes se distinguera par sa possibilité, et mieux encore, sa capacité de donner la vie à tous ceux qui le recevront de notre part (Jn 6 : 63-68).
C’est en cela que le message de Jésus dépasse les dires des pharisiens et des scribes. C’est en cela également que son enseignement acquiert une pleine autorité par rapport à l’enseignement des autres :
« Il les enseignait en homme qui a autorité et non comme leurs scribes » Mt 7 : 29)
- Notre autorité, dérivant normalement de celle de Christ, tient à plusieurs facteurs déterminants et intimement liés :
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- Notre connaissance de la parole de Dieu ;
- Notre connaissance de l’homme auquel est destiné la Parole de Dieu ;
- Notre connaissance de l’Eglise ;
- Notre connaissance de nous-même les messagers ;
- Notre connaissance de l’art de communiquer avec les gens ;
- Notre connaissance de l’art de communiquer (transmettre) un savoir de façon convaincante et indélébile.
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Disons-le simplement :
- Notre connaissance de la Parole de Dieu ne peut être réelle si nous ne nous efforçons pas de connaître celui qui parle à travers l’histoire de l’humanité.
Ainsi donc, Parole de Dieu, Révélation, Histoire de salut, nous permettent plus ou moins de connaître Dieu et sa Volonté qui se manifestent dans la réalité de l’alliance.
Cela permet surtout de saisir le vrai Esprit de Dieu, et savoir que le même Esprit permet de traduire cette parole en fidélité à l’Esprit.
- Notre connaissance de l’homme auquel est destiné la Parole de Dieu implique qu’on connaisse son évolution ou son histoire ; son cadre de vie et l’influence de ce cadre de vie sur sa vie, et son influence propre sur l’environnement. Cela nous amène à découvrir les lois qui agissent sur lui, même de façon inconsciente.
Cette connaissance donne des possibilités d’élaboration d’une stratégie d’annonce de la parole fidèle à l’homme, c’est-à-dire une pastorale fidèle à l’homme dans sa manière de penser sa vie et dans sa manière de l’organiser…
- Notre connaissance de l’Eglise nous oblige à nous pencher sur le Christ, Chef de l’Eglise et à le contempler pour l’imiter ; sur son histoire comme processus de l’incarnation du Royaume de Dieu dans l’espace et le temps, avec ses hauts et ses bas, ses grandes figures, les divers conciles comme moments de vie intense, la formulation des dogmes comme étapes importantes de fixation ou de conservation d’une doctrine orthodoxe ou fidèle à l’enseignement du Christ, les documents du Magistère, la Patristique ou expérience pastorale des Pères de l’Eglise dans les premiers siècles, etc.
- Notre connaissance de nous-même les messagers est nécessaire. Elle nous permet de nous situer raisonnablement. Elle nous évitera beaucoup d’erreurs pouvant compromettre notre action pastorale. Aucun messager ne doit et ne peut :
- S’ignorer ou ignorer ses origines (le cadre de vie naturel et aussi l’origine de sa mission)
- Ignorer ou effacer ses prédécesseurs (leur expérience sur le même champ d’apostolat aide à avoir des idées claires pour mieux s’organiser…)
- Ignorer ou oublier ce qu’il est et faire comme s’il jouait un personnage (il doit avoir une idée claire de lui-même : « Connais-toi toi-même » ; se demander souvent comme le Christ : « qui dit-on que je suis ? ») ;
- Ignorer ou être indifférent devant les destinataires de son message : attitude qui est à l’origine de bien des résistances à la pénétration du message. Le messager a intérêt à chercher à ce que les destinataires l’intègrent dans leur groupe
- Notre connaissance de l’art de communiquer avec les gens est indispensable. Nous sommes très ignorants sur ce plan. Beaucoup parmi les porteurs de la Bonne Nouvelle du Royaume de Dieu se contentent uniquement du fait qu’ils partent en mission, mais ne sont pas préparés pour accomplir cette tâche avec bonheur. Quand on pense que les administrateurs civils prennent du temps pour se former à l’accomplissement de cette lourde tâche selon les grands principes de la continuité, du bien commun, de la légalité et de l’égalité, nous voyons la pauvreté et l’incompétence de nos agents de l’évangélisation.
La formation n’est pas une garantie de la réussite, mais autant la faire.
Pour qu’il existe une authentique communication entre le messager et les gens auxquels il est envoyé, celui-ci doit être capable ou apte à établir de saines relations avec eux. On ne communique bien qu’avec celui avec qui on a des affinités.
Il est donc utile, voire nécessaire, de créer un cadre affectif, en évitant de le rendre absorbant, pour obtenir une communication réelle, une vraie communication peut et doit être organisée.
- Notre connaissance de l’art de leur communiquer un savoir qu’ils ne semblent pas avoir de façon certaine ou convaincante. Il s’agit ici de la science pédagogique qui est également une grande carence dans les milieux de nos agents d’évangélisation.
La communication du savoir, elle aussi, fait appel à l’organisation pour qu’elle se réalise selon les objectifs de croissance intégrale de l’homme.
Ces objectifs devant être atteints par la communication du savoir sont les suivants :
- Un savoir être-homme ;
- Un savoir-faire pour soi et pour autrui ;
- Un savoir vivre en communauté.
- L’organisation à mettre en place pour satisfaire et réaliser ces objectifs prévoit ainsi diverses techniques et méthodes dans le processus de communication du savoir, c’est-à-dire dans la formation des individus, des groupes ou des masses.
C’est dire que les termes : communication du savoir – pédagogie -formation, renvoient à la réalité de l’école et convergent sur la réalité de l’école de l’animation ou école de promotion collective, ou encore école d’apprentissage à l’esprit et aux actions communautaires.
Une telle école épargne aux populations de devoir subir une action démagogique qui n’est rien d’autre que sabotage !
- Si jamais, dans notre pastorale, nous avions le bonheur de tenir compte de ces facteurs déterminants et de les respecter, nous aurions de fortes chances de réaliser une pastorale de qualité sous les quatre angles intellectuel (recherche et fidélité), spirituel (foi vivante célébrée), moral (conscience droite, honnêteté, justice), technique (techniques et méthodes d’animation réalistes).
Pastorale de qualité, renvoie ici à notre humble avis, à ce que demande notre Evêque dans sa circulaire n° 4/88/4.22 du 29 janvier 1988 (voir dans Diocèse d’Obala, Pour une mise en marche aussi rapide que possible des activités pastorales, 1988).
« Pastorale d’ensemble,…
Harmonisée dans ses objectifs, ses méthodes et ses moyens ».
Pastorale qui fait appel et s’appuie sur l’unité d’action ou exécution effectuée dans un mouvement d’ensemble ;
Pastorale empreinte de sagesse et de prudence, ou inspirée, initiée et conduite sous l’Esprit-Saint.
Pastorale de qualité, si l’on s’appuie sur ce que demande l’Evêque, implique la nécessité d’une concertation vraie, nous entendons par là l’acceptation de l’élaboration de plans d’action particuliers en cohérence avec le projet commun de l’ensemble des ouvriers apostoliques, et surtout l’acceptation de voir certains secteurs d’activités évoluer plus que d’autres, dans la grande sérénité.
Pastorale de qualité, fait aussi appel à l’organisation de la circulation permanente de l’information dans le double but immédiat de faire savoir ce qui se passe à un plus grand nombre et de le conserver aussi, dans le but éloigné d’exploiter et d’élaborer quelque chose de meilleur.
Pastorale de qualité, implique les exigences de compétence, d’efficacité, de bonne volonté, de bénévolat, d’assiduité, de discipline, de dignité et d’honneur.
Pastorale de qualité, prévoit des cercles de discussions larges et approfondies, des sessions de formation de toutes sortes, pour chaque catégorie ou parfois pour tous, des temps de retraite et d’itinérance…
Pastorale de qualité, exclut les campagnes de dénigrement, la fausseté des rapports sur les individus, les situations ou les activités, le sentimentalisme.
Avec la seconde Evangélisation dite Evangélisation en profondeur, les temps nouveaux d’évangélisation sont pour nous arrivés.
Ne manquons pas le départ !
Abbé Jean-Marie NDZOMO MALLA
Le 16 mai 1988 à Nkol-Edjon (KOAN)